Le baiser renversé, le french kiss, le baiser papillon… il y’a presque autant de déclinaisons de baisers que de personnes.
Cher lecteur, calmes tes ardeurs.
Et si nécessaire, prends une douche froide.
Aujourd’hui, nous n’allons pas parler des différentes manières d’embrasser. Non, nous allons plutôt décrypter les mécanismes sous-jacents à cet acte romantique.
Si tu crois que c’est un incontournable des relations humaines, première erreur.
Que tu le fais juste par plaisir ? Oui et non.
Que c’est un acte anodin ? Non, embrasser est un art sportif
Je ne peux pas te dire que cet article fera de toi le roi du baiser, mais je peux t’affirmer qu’après l’avoir lu, tu auras la réponse à la question : pourquoi embrassons-nous ?
Le baiser : signe universel d’amour ? Pas vraiment…
Cher lecteur, je vais te révéler une nouvelle qui risque de te surprendre. Embrasser n’est ni un geste inné, ni un acte universel.
En 2015, Jankowiak et al. ont réalisé une étude sur plus de 168 cultures à travers le monde, et seules 46% s’embrassent, romantiquement parlant.
Oui, oui, près de 54% des cultures n’éprouvent ni désir, ni envie de partager leur salive avec leur partenaire… Certaines, comme la tribu Mehinaku au Brésil trouve même cela aberrant.
Le baiser est une invention assez récente, qui découle très probablement de la coutume selon laquelle des femmes mastiquaient la nourriture avant de la régurgiter et de la donner à leurs bébés… love is love. Visualises la nutrition du bébé par mastication. Maintenant, un baiser super romantique. Ai-je vraiment de jouer au jeu des sept différences ? Au fil du temps, il est facile de voir à quel point le baiser a changé.
Les premiers rapports sur le baiser datent de 3500 ans et viennent de textes hindous. Au 2nd siècle, le Kamasutra, must-have de la littérature érotique, dédie tout un chapitre à l’embrassade. Le baiser y était alors décrit comme l’aspiration de l’âme de l’autre.
Tu comprends donc la nécessité d’avoir des lèvres pulpeuses : n’aspires pas l’âme de quelqu’un avec tes lèvres craquelées. Ou fais un bond dans le passé, direction Égypte antique : les égyptiens, a contrario, ne s’embrassaient pas mais collaient leurs fronts pour témoigner de leur attachement.
Je comprends tout à fait qu’il soit facile de percevoir le fait de s’embrasser comme un acte universel et naturel car nous sommes ce que nous lisons et regardons : qui n’a jamais rêvé de ce long baiser sous la pluie, façon Hollywood ? Qui ne trépigne pas d’impatience en attendant le moment où le héros va plonger son regard dans les yeux de sa dulcinée et… Je m’arrête là.
Tu as compris où je voulais en venir. La culture détermine notre perception du baiser, qu’on le veuille ou pas. Mais en aucun cas, le baiser n’est un acte inné.
En fonction des cultures, on s’embrasse ou pas. En public ou pas. Et de différentes façons. Mais cela ne te dit toujours pas, pourquoi on s’embrasse. Et encore une fois, la réponse à cette question se trouve dans nos alliées de tous les jours : les hormones.
Un doux poison…
Bon d’accord. S’embrasser ne te tuera pas. A moins que parmi les 80 millions de bactéries qui s’échangent au cours de cet instant, il y’en ait une mortelle…
Sur cette entrée en matière charismatique, entrons dans le vif du sujet : pourquoi exactement nous embrassons nous ?
Pour identifier le meilleur partenaire reproducteur
Oui, cher lecteur, tu as bien lu. Coller tes lèvres à celles d’une personne et échanger tes fluides biologiques te permet de choisir le meilleur partenaire reproducteur.
En 1995, Wedekind et al. ont démontré que le Complexe Majeur d’Histocompatibilité ou CMH jouait un rôle majeur dans la sélection naturelle et était détecté par voie olfactive. Plus les CMH sont différents, plus les personnes sont attirées l’une par l’autre. Vu que les humains ne sont pas connus pour leur sens de l’odorat développé, le baiser permet de se rapprocher au plus près de l’autre et de le « sentir ».
Et là, tu te demandes ce qu’est le CMH.
Le CMH est un ensemble de molécules qui permettent à l’organisme de reconnaître les organismes étrangers. Plus le CMH est varié, meilleur est le système immunitaire. Il est donc clair qu’il est plus bénéfique de se reproduire avec un CMH aussi différent du sien que possible pour avoir un enfant jouissant d’un excellent système immunitaire.
Pour planter les préliminaires de l’acte sexuel
Cette partie est plus vraie pour les femmes que pour les hommes.
En 2007, Hughes et al. ont réalisé une étude sur 1041 sujets afin de déterminer la perception du baiser. Il en est ressorti que les femmes sont plus enclines à refuser d’avoir des rapports sexuels sans baiser préalable.
Tandis que les hommes y accordent moins d’importance et peuvent faire sans. Oh ! Et la salive contient de la testostérone, une hormone connue pour intervenir dans le désir sexuel.
Pour évacuer le stress
Le baiser n’est pas juste romantique ou pratique, non, il est aussi relaxant. Et ça, c’est parce que le fait de s’embrasser provoque la libération d’hormones, qui diminuent le stress et consolident les liens.
Wendy et al. (2009) ont mené une suite d’expérimentations sur des couples de longue durée. Il en est ressorti que le taux de cortisol (hormone liée au stress) baissait après chaque baiser, et que son décroissement était proportionnel à la durée de la relation.
A contrario, d’autres hormones telles que la dopamine voient leur taux augmenter. Petit rappel : la dopamine est appelée molécule du bonheur. L’expression résume son action.
Quant à l’ocytocine, aussi appelée molécule de l’attachement et qui intervient après la chimie du coup de foudre, son taux n’augmente que chez les hommes. Cela tend à montrer qu’il faut plus qu’un baiser aux femmes pour ressentir de l’attachement. Et oui, tomber sous le charme du prince charmant, ça n’existe que dans les contes de fées !
Pourquoi embrassons-nous ? Cher lecteur, tu as déjà les éléments de réponse, à toi de compléter le tableau. D’après Helen Fischer, le fait de s’embrasser est impliqué dans trois niveaux des relations humaines :
- Le sexe, grâce à la testostérone ;
- L’amour romantique, avec la dopamine et d’autres molécules de l’amour ;
- L’attachement avec une tête de liste l’ocytocine.
La salive échangée au cours d’un baiser contient de la testostérone, les hormones du bonheur sont distribuées quand nous nous embrassons et nous maintiennent dans cet état d’euphorie, et pour finir l’ocytocine contribue à créer un lien sur le long terme. Et tout cela commence par un baiser.
Des résultats confirmés par Wlodarski & Dunbar, en 2013, qui reconnaissent trois rôles au baiser romantique : sélectionner le partenaire, créer de l’attachement et faciliter les relations sexuelles.
Cher lecteur, tu viens d’avoir un bref aperçu de la Philematologie. Ce nom imbuvable désigne la partie de la science qui se consacre à l’étude du baiser sous toutes ses coutures.
En chiffres, un baiser, c’est l’échange de 9 mg d’eau, 0.7 mg de protéines, 0.18 mg de composés organiques, 0.71 mg de matières grasses, et 0.45 mg de chlorure de sodium, ainsi qu’entre 10 millions et 1 milliards de bactéries.
Quand tu embrasses passionnément, tu utilises 34 muscles faciaux, 112 postures musculaires et brûles près de 26 calories par minute. Mais ça, ce ne sont que des chiffres.
Derrière un baiser, il y’a toujours plus que des nombres, des hormones ou de la sélection naturelle. Il y’a toi et il y’a l’autre.
Une alchimie dont tu peux nous parler en commentaires et avant de partir, surtout, SURTOUT abonnes toi au blog et reçois un email à chaque fois qu’un article de blog est publié.
RÉFÉRENCES
Alpert S. Joseph (2013) Philematology: the science of kissing. A message for the marital month of June. The American Journal of medicine 126 (6): 466
Güntürkün, O. (2003).Adult persistence of head-turning asymmetry. Nature (421): 711
Helen Fischer (2004) Why we love: the nature and chemistry of romantic love. Published by Henri Lot & Co.
Hughes Susan, Harrison Marisson A., Gallup Gordon Jr. (2007) A kiss is still a kiss or is it ? Evolutionary psychology 5 (3): 956-959
Jankowiak R. William, Volsche Shelly L., Garcia Justin R. (2015) Is the romantic-sexual kiss a near human universal ? American anthropologist 117 (3) : 535-539
Santos P.S., Schinemann J.A, Gabardo J., Bicalho Mda (2005). New evidence that the MHC influences odor perception in humans: a study with 58 Southern Brazilian students. Hormonal Behaviour 47 (4): 384–388.
Wedekind, C. et al. (1995) MHC-dependent preferences in humans. Proceedings of the Royal Society of London. 260 (1359): 245–249.
Wendy Hill, Helen Fischer, Donald Lateiner (2007) Study presentation – American Association for the Advancement of Science on Friday
Wlodarski Raphael, Dunbar Robin I. M. (2013) Examining the possible functions of kissing in romantic relationships. Archives of sexual behavior 42 (8): 1415-1423.
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